Une enquête a été réalisée dans sept pays à la demande du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). La moitié des personnes interrogées (51 pour cent) ont déclaré que la pandémie de Covid-19 avait un impact négatif sur leur santé mentale.
« Au sein des populations vivant en zone de conflit, plus d’une personne sur cinq présente un problème de santé mentale, d’un type ou d’un autre. Cette proportion est trois fois plus élevée que dans la population générale », déclare le directeur général du CICR, Robert Mardini. « La pandémie est venue aggraver la détresse psychologique de milliers de personnes touchées par des conflits armés. Aux inquiétudes liées à la santé et au bien-être de chacun, s’ajoutent les effets combinés des restrictions du confinement et de l’absence de contacts et de dérivatifs sociaux qui, outre l’aggravation des difficultés économiques, auront également un impact sur la santé mentale et l’accès aux soins ».
Certes, cette crise touche chacun de nous. Néanmoins, la pression exercée par la nécessité de répondre à la pandémie de Covid-19 est bien plus grande encore dans les zones de guerre, où il est impossible de travailler, où l’eau est rare, où les hôpitaux ont été bombardés ou sont submergés par l’afflux de blessés, et où la population est forcée de fuir vers des camps surpeuplés accueillant les personnes déplacées, et tout cela en l’absence d’informations de santé publique fiables.
Chez certaines personnes, l’isolement social et le confinement ont fait ressurgir d’horribles souvenirs de guerre. Parlant depuis le salon de coiffure qu’elle a ouvert à Aarsal, au Liban, Nazha Motee’ El Hallaq, une réfugiée syrienne, explique : « Au moment où le confinement a commencé et où nous nous sommes retrouvés à la maison sans pouvoir sortir, l’époque où nous vivions en Syrie et où les bombardements et les tirs d’artillerie empêchaient tout déplacement m’est revenue en mémoire ».
Les habitants de Gaza se sentent extrêmement vulnérables. Tous craignent pour leur propre sécurité et celle de leurs proches, tout en sachant que la fourniture des services dont ils dépendent – l’électricité, par exemple – peut être interrompue à tout moment. Il importe de ne pas sous-estimer les conséquences de la pandémie de Covid-19 sur la santé mentale d’une population confrontée depuis 14 ans à de lourdes restrictions de circulation des personnes et des marchandises.
L’impact actuel de la pandémie de Covid-19 sur l’économie et sur la sécurité alimentaire est massif, et la situation va vraisemblablement s’aggraver avec le temps. Refusant de baisser les bras, les soutiens de famille et les prestataires de soins doivent parfois choisir entre la faim et l’exposition au Covid-19 pour pouvoir joindre les deux bouts, et tout cela en subissant constamment la menace d’un conflit et de la violence. Veuve et mère de neuf enfants, Fatima Maina, qui vit dans l’État de Borno, dans le nord-est du Nigéria, explique : « Nous n’avons pas de nourriture, pas d’eau – la vie est dure pour moi et pour mes enfants. Ils ont été renvoyés de l’école. Mes enfants ont perdu leur père. J’ai neuf enfants et je souffre ».
À Donetsk, en Ukraine, le CICR poursuit les distributions de colis de vivres et d’articles d’hygiène. Toutefois, Tamara, qui est retraitée, reste inquiète, car elle se demande combien de temps ces provisions vont durer. « Nos pensions ne suffisent pas. Ces colis nous permettront de survivre quelque temps. La nuit, nous ne pouvons pas dormir. Nous sommes stressés. Avec toute cette peur, notre tension artérielle augmente », explique-t-elle.
À la suite de l’explosion survenue à Beyrouth en août dernier, la situation est particulièrement difficile pour certains des groupes les plus vulnérables se trouvant au Liban, et notamment pour les quelque 1,5 million de réfugiés syriens. Comme l’explique Christelle Madani, psychologue au CICR, « la population libanaise était déjà épuisée économiquement et psychologiquement, notamment à cause de la pandémie de Covid-19. En venant frapper chacun à l’intérieur de ses propres murs, cette énorme explosion a ébranlé le peu de sentiment de sécurité qui subsistait encore ».
Dans le cadre de l’enquête du CICR, près de trois répondants sur quatre (73 pour cent) ont estimé que les personnels et les intervenants qui travaillent aux premières lignes des soins de santé avaient davantage besoin d’un soutien en santé mentale qu’un individu moyen. Les difficultés liées à leurs fonctions viennent encore aggraver leurs propres besoins et préoccupations d’ordre individuel et social. Ils doivent avoir accès aux services d’appui et de prise en charge pour pouvoir poursuivre leurs activités et continuer à prendre soin des autres de manière appropriée ». Nous avons vraiment vu des choses terribles, mais nous espérions aussi pouvoir faire de notre mieux pour chaque patient », déclare le Dr Sérgio Simões, qui travaille dans un hôpital à Fortalez, au Brésil. « La crise a eu un impact psychologique sur chacun de nous. Plusieurs de mes collègues ont consulté un psychologue ou même un psychiatre. Moi-même, je souffrais d’anxiété et j’ai dû voir le psychiatre pour qu’il augmente ma dose de médicament, car nous étions vraiment dans une situation difficile ».
Le CICR a continué d’offrir des services de santé mentale et de soutien psychosocial (SMSPS) dans les zones de conflit pendant la pandémie de Covid-19. Joy Adams, psychologue au CICR, est en charge de programmes de soutien psychologique dans les camps qui accueillent des personnes déplacées par suite des combats en cours dans le nord-est du Nigéria. « Un si grand nombre de ces femmes ont traversé de terribles épreuves. Elles ont lutté pendant des jours, des semaines et des mois avant d’arriver dans un endroit où elles pensaient être en sécurité », dit-elle. Le problème, c’est que l’un des volets essentiels de ces programmes consiste à réunir des personnes et à mettre sur pied des groupes de discussion. « Vraiment, la Covid-19 nous a fait reculer », regrette-t-elle. « Bien des gens se demandent s’il n’est pas dangereux de recommencer à se rencontrer. Et la taille des groupes a été réduite, passant de douze à cinq ou six participantes pour respecter les règles de la distanciation sociale ».
Le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge formule notamment – à l’adresse des États, des responsables politiques et des défenseurs et praticiens de la santé mentale et du soutien psychologique – les recommandations suivantes :
· Assurer un accès rapide et durable aux services de santé mentale et de soutien psychosocial pour les personnes touchées par la pandémie
· Intégrer la santé mentale et le soutien psychosocial dans toutes les activités visant à répondre aux besoins résultant de la pandémie
· Prioriser la protection de la santé mentale et du bien-être psychosocial du personnel et des volontaires qui répondent aux besoins humanitaires liés à la pandémie
Note aux rédacteurs en chef :
À propos de l’enquête du CICR : Au total, 3 500 personnes – dans sept pays, à savoir l’Afrique du Sud, la Colombie, le Liban, les Philippines, le Royaume-Uni, la Suisse et l’Ukraine – ont répondu à l’enquête commissionnée par le CICR. Dans chacun de ces pays, l’enquête a été réalisée par Ipsos entre le 18 et le 22 septembre auprès d’un échantillon national représentatif de 500 personnes. Les résultats par pays sont disponibles sur demande.
Pour plus d’informations, veuillez prendre contact avec :
Aurélie Lachant, Comité international de la Croix-Rouge (CICR)
Genève : + 41 79 244 64 05, alachant@icrc.org
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LISTE DES PLANS
Lieux de tournage : divers
Caméras : diverses
Production / Montage : Christopher Nicholas
Période de tournage : 2020
Durée : 07:14
Crédit à l’écran en tant qu’auteur : CICR
Réf. CICR : 20201006-MentalHealth
Copyright : CICR
00:00 Camp de déplacés à Maiduguri. Femmes participant au programme de santé mentale et soutien psychosocial (SMSPS) géré par le CICR et la Croix-Rouge du Nigéria, septembre 2020.
00:45 Extrait sonore Joy Adams, psychologue au CICR, septembre 2020
« Un si grand nombre de ces femmes ont traversé de terribles épreuves. Elles ont lutté pendant des jours, des semaines et des mois avant d’arriver dans un endroit où elles pensaient être en sécurité.
L’une des choses que nous faisons, dans les groupes de discussion, c’est de permettre aux unes et aux autres de partager les expériences qu’elles ont vécues et, peut-être, de parler d’un problème particulier qui les tourmente. Disons, par exemple, que nous parlons de flashbacks. Les participantes ont la possibilité de dire ce qu’elles pensent et d’expliquer comment ces rappels d’un événement traumatisant ont un impact sur elles-mêmes ainsi que sur leur fonctionnalité au sein de leur famille et de leur foyer, avec leurs enfants et dans leur travail.
Vraiment, la Covid-19 nous a fait reculer. Bien des gens se demandent s’il n’est pas dangereux de recommencer à se rencontrer. En fait, même si essayons de relancer des activités, la maladie va réduire le nombre de participantes que nous réussissons à réunir. De plus, beaucoup de femmes hésitent beaucoup à revenir : elles ne sont pas sûres de ne pas prendre de risques en ayant des contacts. Chacune se pose des questions et semble dire `Je n’ai pas confiance... je ne sais pas si vous avez la Covid ou non´. La situation est donc encore très difficile. Tout au long de ces trois dernières semaines, nous avons tenté de contacter nos bénéficiaires, mais nous ignorons même où se trouvent certaines d’entre elles. Cela fait trois mois que nous ne les avons pas vues. De fait, nous avons dû réduire le nombre de participantes en passant de douze à cinq ou six pour respecter les règles de la distanciation sociale ».
02:22 Extrait sonore Robert Mardini, directeur général du CICR, Genève, septembre 2020
« Au sein des populations vivant en zone de conflit, plus d’une personne sur cinq présente un problème de santé mentale, d’un type ou d’un autre. Cette proportion est trois fois plus élevée que dans la population générale », déclare le directeur général du CICR, Robert Mardini. « La pandémie est venue aggraver la détresse psychologique de milliers de personnes touchées par des conflits armés. Aux inquiétudes liées à la santé et au bien-être de chacun, s’ajoutent les effets combinés des restrictions du confinement et de l’absence de contacts et de dérivatifs sociaux qui, outre l’aggravation des difficultés économiques, auront également un impact sur la santé mentale et l’accès aux soins ».
02:59 Nazha Motee’ El Hallaq, une réfugiée syrienne qui a reçu de l’aide du CICR et de la Croix-Rouge britannique, dans le salon de coiffure qu’elle a ouvert à Aarsal, au Liban, mai 2020.
03:21 Extrait sonore Nazha Motee’ El Hallaq, mai 2020
« Au moment où le confinement a commencé et où nous nous sommes retrouvés à la maison sans pouvoir sortir, l’époque où nous vivions en Syrie et où les bombardements et les tirs d’artillerie empêchaient tout déplacement m’est revenue en mémoire ».
03:31 Rues de Gaza pendant le confinement, août 2020.
03:55 Communautés agricoles nigérianes recevant des semences et des allocations en espèces, Maiduguri, État de Borno, Nigéria, mai 2020.
04:34 Extrait sonore Fatima Maina, qui est veuve et vit dans l’État de Borno (nord-est du Nigéria)
« Nous n’avons pas de nourriture, pas d’eau – la vie est dure pour moi et pour mes enfants. Ils ont été renvoyés de l’école. Mes enfants ont perdu leur père. J’ai neuf enfants et je souffre ».
04:47 Distribution de produits alimentaires et d’hygiène à la population à Donetsk, en Ukraine, mars 2020.
05:04 Extrait sonore Tamara, une retraitée vivant à Donetsk, en Ukraine
« Nos pensions ne suffisent pas. Ces colis nous permettront de survivre quelque temps. La nuit, nous ne pouvons pas dormir. Nous sommes stressés. Avec toute cette peur, notre tension artérielle augmente ».
05:31 Des habitants de Beyrouth nettoient les rues après l’explosion qui a ravagé la ville, août 2020.
06:09 Extrait sonore Christelle Madani, psychologue au CICR, Beyrouth, août 2020
« La population libanaise était déjà épuisée économiquement et psychologiquement, notamment à cause de la pandémie de Covid-19. En venant frapper chacun à l’intérieur de ses propres murs, cette énorme explosion a ébranlé le peu de sentiment de sécurité qui subsistait encore ».
06:22 Bâtiments détruits à Beyrouth, août 2020.
06:38 Le Dr Sérgio Simões, médecin de l’établissement de soins d’urgence Yolanda Queiroz à Fortaleza, au Brésil, août 2020.
06:47 Extrait sonore Dr Sérgio Simões, août 2020
« La crise a eu un impact psychologique sur chacun de nous. Plusieurs de mes collègues ont consulté un psychologue ou même un psychiatre. Moi-même, je souffrais d’anxiété et j’ai dû voir le psychiatre pour qu’il augmente ma dose de médicament, car nous étions vraiment dans une situation difficile ».
07:02 Le Dr Sérgio Simões procède à un examen médical, août 2020.
07:14 FIN