Sanaa (CICR) : après environ huit années de conflit armé, le Yémen traverse une crise profonde de l’éducation. Plus de deux millions d’enfants ne sont pas scolarisés et nombreux sont ceux qui grandissent dans un environnement où l’accès à l’éducation est incertain. Étant donné l’importance de l’éducation pour soutenir le relèvement du Yémen après le conflit, ces années d’enseignement perdues auront des conséquences majeures.
À Taïz, un professeur et des écolières ont improvisé une salle de classe au milieu de la route, juste en face de leur école qui a été fortement endommagée. Cette scène frappante résume la dure réalité de toute une génération d’enfants yéménites qui luttent pour accéder à l’éducation. Le nombre d’enfants qui connaissent un apprentissage chaotique lié aux conséquences directes ou indirectes du conflit est en hausse.
D’après les chiffres de l’UNICEF, plus de deux millions d’enfants ne sont pas scolarisés, plus de quatre millions ont besoin d’assistance pour accéder à l’éducation et plus de 20% de tous les établissements scolaires du primaire et du secondaire sont fermés.
Des étudiants et enseignants sont tués ou blessés au sein des établissements scolaires ou sur leur trajet quotidien, tandis que l’absence de salaire force des milliers d’enseignants à chercher un autre emploi. Les dangers et l’impact économique du conflit ont également contraint des milliers de familles à arrêter d’envoyer leurs enfants à l'école, en particulier les filles.
« Mon père a perdu une jambe et un bras et ne peut plus travailler, donc mes frères et sœurs ont dû arrêter leur éducation et trouver un travail à la place, » explique Afaf, fille de 11 ans qui vit dans un camp de personnes déplacées internes à Hodeïda. Elle est la seule de la famille à aller à l’école. « Je vais en classe, mais l’école du camp n’a pas les moyens de payer le salaire des professeurs, donc nous dépendons des personnes volontaires pour apprendre. »
Au Yémen, les écoles n’ont pas été épargnées pendant le conflit prolongé. Au cours des huit dernières années, au moins un établissement scolaire sur quatre a été détruit, endommagé, ou utilisé à des fins non éducatives. En vertu du droit international humanitaire, les parties à un conflit sont tenues de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des personnes et des infrastructures civiles. Toute violence à l’encontre des élèves, du personnel enseignant, des écoles ou des universités entraîne des dommages durables. Cela entrave également le processus de relèvement après la fin du conflit.
« Mon ancien établissement était situé sur le front. J’ai dû changer d'établissement et je dois maintenant marcher chaque jour pendant une heure et demie pour arriver à ma nouvelle salle de classe », déclare Ahmed, jeune homme de 17 ans originaire de Taïz, ville qui a été le théâtre des combats les plus longs du Yémen, et où les étudiants doivent naviguer entre les lignes de front pour se rendre à l’école. « Un jour, mon camarade de classe a été tué par balle sur le trajet de l’école. J’étais avec lui et j’ai vécu une expérience atroce. J'étais recouvert de son sang et je ne savais pas quoi faire. »
Au Yémen, dans ce contexte explosif où de nombreux enfants ont uniquement connu la vie pendant le conflit, un accès sécurisé à l’éducation peut atténuer l’impact psychologique de la violence en offrant aux plus jeunes un sentiment de routine. Pour lutter contre la crise de l’éducation au Yémen, il faut mettre en place une approche exhaustive et multisectorielle qui répond à tous les besoins fondamentaux, car tous les besoins essentiels sont liés.
« L’ampleur des besoins humanitaires dépassait déjà les capacités des acteurs humanitaires. D’importantes coupes budgétaires signifient désormais que des millions d’enfants yéménites auront encore moins accès à la nourriture, la santé, un abri et l'éducation », a déclaré Katharina Ritz, cheffe de la délégation du CICR au Yémen. « Seules des mesures politiques pourront résoudre cette situation humanitaire désespérée. Il est donc primordial d’intensifier les efforts pour trouver une solution. »
Pour plus d’informations, veuillez contacter :
Basheer Omar (Sanaa) balselwi@icrc.org +967 737889476 et/ou +967 771 480 412
Imene Trabelsi (Beyrouth) itrabelsi@icrc.org +961 3 138 353
Liste des logs
Titre : Yémen
Lieu de tournage : Marib/Taïz/Hodeïda
Durée : 9 min. 29 s
Production : Wagdi Almaqtari/CICR
Langues de production : arabe / anglais
Dates de tournage : septembre 2022
Copyright : CICR – images libres de droits
Script de la liste des logs
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Nom de la personne interviewée, lieu |
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B-ROLL : externe, Taïz, Yémen. Plusieurs plans des écoles détruites dans la ville de Taïz et des cours des étudiants dans leurs bâtiments scolaires provisoires.
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Extrait sonore 1 : Ahmed Abdulla, étudiant de 17 ans à Taïz |
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Je m’appelle Ahmed Abdulla, j’ai 17 ans et j’ai 3 frères et sœurs. Il nous faut une heure et demie pour aller à l’école. On passe par de petites rues et le trajet est très risqué.
Avant, on fréquentait l'établissement Omar Abdulaziz, qui se trouve désormais dans une zone proche de la ligne de front.
On étudie maintenant dans le même établissement mais dans une seule pièce, et pas toute l’école.
Une fois, mes amis et moi on allait à l’école et il y a eu des coups de feu. Trois personnes se sont pris une balle, certaines sont mortes et mes amis ont été blessés. Notre proviseur a reçu une balle dans le cou, mais il a survécu.
J’adore l’école, parce que c'est la base pour apprendre, et sans apprentissage, il n’y a pas d’avenir.
Le plus dur a été quand l’un de mes amis s'est pris une balle dans la tête en allant à l’école. J'étais recouvert de son sang, c’était terrifiant et je ne savais pas quoi faire : pleurer ou paniquer.
Une personne est venue l’aider, j’avais quelques notions des premiers secours, mais lorsqu’il est arrivé à l’hôpital, il était déjà mort. Paix à son âme. |
03.45 |
B-ROLL : Hodeïda, camp de personnes déplacées d’Al Gasha. Différents plans d'étudiants et de professeurs dans leurs classes près du camp |
Extrait sonore 2 : Personne interviewée : Afaf Gawhar / élève / Hodeïda |
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Je m’appelle Afaf Gawhar, j’habite dans le camp d’Al-Gasha dans le bloc 10 et j'ai été déplacée de Hodeïda.
J’ai 5 frères et sœurs, il y a un professeur et les autres ont arrêté leurs études. Ils ont été à l'école primaire avant d’arrêter. Ils ont simplement décidé de ne pas étudier.
Notre père a un caillot dans la jambe et mes frères et sœurs doivent travailler pour l’aider. Au moins, ils savent lire.
Le camp est situé près de cette école.
Nos professeurs n’ont pas de salaire, tout le monde est bénévole. |
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B-ROLL : Externe, Marib Plans courts de drones survolant le camp de personnes déplacées de Sweida à Marib.
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B-ROLL : Externe, Marib Plusieurs plans de la cour de l’école, des élèves et des enseignants en classe
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Extrait sonore 3 : – Enseignant d'école primaire, camp d’Al-Sweida, Marib |
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07:28
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Voici l’école d’Al-Kuwait dans le camp de personnes déplacées de Sweida à Marib.
Enseigner comporte son lot de difficultés, surtout en été avec la chaleur.
Nous n’avons pas de programme, aucun enseignant à proximité et on marche 5 à 6 km en plein soleil, dans cette zone désertique.
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B-roll : deux élèves pendant la pause à l'école
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Extrait sonore 3 : Buthaina Yihya, camp d’Al-Sweida, Marib |
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Buthaina Yahya : oui je veux poursuivre mes études jusqu’à la fin.
Mon établissement est Al-Kuwait, dans le camp d’Al-Sweida.
(Question) Quelle distance dois-tu parcourir jusqu’à l’école ?
Aller à l'école me prend jusqu’à 1 heure et 45 minutes parce que c'est loin, les routes sont rocailleuses et notre maison est située près des montagnes.
Le conflit a un impact énorme sur nos vies. La guerre nous a forcés à quitter nos maisons pour nous installer dans des tentes, et maintenant, nous étudions dans ces camps.
On emprunte différents chemins pour aller à l'école pour éviter les mines terrestres déplacées après les inondations. On choisit un trajet que l’on connaît bien pour marcher.
J’adore l'école, je veux terminer mes études, apprendre, et faire le plein de connaissances pour réussir plus tard. |