YÉMEN : LA FAIM ET LA MALNUTRITION INFANTILE MENACENT DE NOMBREUSES VIES
Selon la récente analyse des centres de santé que soutient le Comité international de la Croix-Rouge, la malnutrition infantile est en hausse au Yémen.
Sur plus de 56 000 enfants de moins de cinq ans traités l’an dernier (de janvier à novembre), plus du quart souffrait de malnutrition aiguë. Plus de 4500 enfants étaient si malnutris qu’ils étaient en danger de mort et nécessitaient un traitement immédiat.
On estime à 20 millions le nombre de personnes ne trouvant pas de quoi se nourrir au Yémen aujourd’hui ou n’en ayant pas les moyens, et à 3,2 millions le nombre d’enfants et de femmes souffrant de malnutrition aiguë.
Selon les projections de l’IPC, le système mondial permettant de classifier la sévérité et l’ampleur de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition, la malnutrition aiguë devrait toucher cette année plus de 2,25 millions d’enfants de moins de cinq ans et plus d’un million de femmes enceintes et allaitantes.
« La plupart des cas que nous recevons par mois sont des cas de malnutrition. Les gens vivent dans des conditions difficiles ; ils n’ont pas de travail, peu de revenus et, comme ils peuvent à peine subvenir aux besoins de leurs familles, ils n’ont pas les moyens de se faire soigner », explique Mai Abdul Rahman, infirmière au service de nutrition du Centre de santé de Kapota à Aden.
Le nombre des Yéménites – adultes et enfants – souffrant de la faim n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Il y a avait de la malnutrition au Yémen pendant les décennies passées mais la situation actuelle est la résultante d’un conflit interminable, de l’effondrement économique, de la hausse fulgurante des prix alimentaires, d’un système de santé en ruine, de restrictions sur les importations, de la perte d’emplois, du déplacement et des effets de la pandémie de Covid-19.
Les déplacés internes, qui ont perdu leur foyer et leurs moyens d’existence et doivent souvent parcourir de longues distances pour se faire soigner, sont extrêmement vulnérables. L’état de santé des malades, notamment des enfants malnutris qui développent facilement des complications médicales, empire souvent avant qu’ils n’aient reçu de traitement, ce qui se traduit par un taux de mortalité élevé.
« Nous recevons de nombreux cas de malnutrition, qui vont de modérés et sévères ; la plupart d’entre eux sont des déplacés. Ils ont à peine de quoi vivre, alors les médicaments, n’en parlons pas ! », dit Fahad Al Hammadi, chef du département des soins infirmiers et des urgences à Taiz.
Le peu de nourriture consommée et la piètre qualité de cette alimentation sont les premières causes de la malnutrition. Les deux tiers des ménages yéménites n’ont pas les moyens de manger à leur faim, et moins de la moitié des enfants ont un régime alimentaire suffisamment varié. Le coût de la vie est monté en flèche depuis le début du conflit. Le prix du panier de la ménagère (riz, lentilles, lait, farines, haricots, huile de cuisson, sucre, sel) a augmenté de 60 % depuis le début du conflit il y a six ans.
« Si on trouve de la farine, on fait du pain et on le mange avec du thé. Notre plus grand souci, c’est la faim : nous avons des enfants pour qui elle n’est pas tenable », dit Hamed Abdo, ouvrier et père de quatre enfants.
Selon les estimations, 80 % de la population du Yémen – soit 24,1 millions de personnes sur une population de 30,5 millions – ont besoin d’une aide humanitaire, et plus de 14 millions vivent dans une détresse extrême.
L’action du CICR
- Le CICR finance le dépistage de la malnutrition modérée et le traitement des enfants qui en souffrent par des compléments alimentaires prêts à l’emploi. Comme une forte proportion des malades rechutent moins de six moins après leur rétablissement, faute de ressources économiques, tous les malades reçoivent, lorsqu’ils sont rétablis, une allocation en espèces destinée à les aider à se nourrir, afin d’éviter une telle rechute.
- Pour une prise en charge satisfaisante des femmes enceintes, les soins prénatals s’accompagnent de la fourniture de moustiquaires, de médicaments et d’articles médicaux.
- Dans les zones à la fois de première ligne et de réinstallation, le CICR secourt les déplacés internes, résidents et rapatriés, sans condition par le biais d’un programme d’allocations en espèces, qui leur permet d’acheter de la nourriture et des articles de base et soutient en même temps les marchés locaux.
- Dans les régions où les marchés sont très perturbés par le conflit, le CICR organise des distributions de vivres ; pour les ménages avec de jeunes enfants, les paniers contiennent des compléments alimentaires prêts à l’emploi pour prévenir la malnutrition.
- Le CICR soutient les activités génératrices de revenu telles que l’agriculture, l’élevage de bétail, les pêcheries, l’apiculture, ainsi que diverses initiatives micro-économiques.
- Il aide les mères de jeunes enfants à produire de la nourriture maison, destinée à la consommation familiale, soutenant par exemple les activités de jardinage pour favoriser une alimentation plus variée et prévenir la malnutrition, tant aiguë que chronique.
- Le CICR est venu en aide à 83 centres de santé primaire et hôpitaux à travers le pays en leur fournissant des médicaments et de l’équipement médical et par des incitations au personnel soignant, surtout dans les gouvernorats toujours en proie à la violence tels que ceux de Taiz, Hodeida, Aden et Sa’dah.
- En 2020, le nombre des consultations données a atteint un total de 845’461, dont 52'179 consultations prénatales, 8'853 accouchements, et 79'751 consultations ayant pour but de surveiller la croissance des enfants.